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‘wǒ bù míng bai’ (je ne comprends pas)

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Je m’étais autrefois donné pour objectif de maîtriser une nouvelle langue par décennie. Si la période 2000-2009 est validée grâce au japonais, alors qu’il ne reste plus qu’une dizaine de jours avant que finisse 2019 force est de constater que j’ai lamentablement échoué cette fois-ci. Je me suis essayé dans un premier temps au coréen, une langue que j’aime beaucoup pour ses sonorités et que je prétendais facile grâce à proximité grammaticale avec le japonais. Puis au chinois, mais plus par nécessité que par réel intérêt puisqu’à l’aéroport nous sommes depuis quelques années assaillis par leurs voyageurs.

Dans les deux cas cela n’a pas donné grand chose. Je sais lire, ou disons prononcer et à peu près écrire le coréen, mais suis bien incapable de lire quoique ce soit en en comprenant véritablement le sens. Pour ce qui est du chinois, je sais compter jusqu’à neuf et ainsi reconnaître les numéros de vols, et connais une vingtaine de mots et expressions qui me permettent de répondre aux FAQ des clients. 

Dans les deux cas je rejette la faute de mon échec sur les manuels d’apprentissages. Toute librairie de bonne taille regorge de bouquins divers et variés, mais tous ont un point commun : Cette foutue fixation sur la prononciation ! J’ai le plus sérieusement du monde suivi pendant un mois les cours quotidiens de chinois de la chaîne radio NHK. Je suis sans doute passé pour un détraqué, à prononcer à haute voix tous les sons dans leurs quatre intonations lors de mes aller-retours de et vers la gare. J’ai finalement baissé les bras en m’apercevant que malgré tous ces efforts je n’étais même pas capable par exemple de me présenter, et encore moins de formuler la moindre phrase. 

Dans une langue comme le chinois où l’intonation d’une syllabe change complètement le sens d’un mot, je veux bien comprendre que l’on puisse accorder beaucoup d’importance à sa prononciation, mais au Japon le problème est le même quelle que soit la langue que l’on tente d’apprendre. Il faut dire que les japonais n’ont pas de chance ; Les pubs à la radio pour les procédés d’apprentissages de l’anglais leur vantent le fait de devenir capable de parler comme s’il s’agissait de leur langue maternelle, de nombreux livres expliquent mots et expressions à utiliser pour avoir l’air naturel. On leur ressasse qu’il faut avoir une prononciation parfaite ou bien se taire de peur de paraître ridicule. En attendant, une ex-collègue japonaise ayant vécue aux Etats-Unis quelques années et parlant l’anglais avec un accent américain californien qui sent bon le sable chaud était complètement incompétente dans son travail. 

Maintenant, dois-je persévérer dans ces deux langues ? Pour me changer les idées pendant les dix années à venir, je suis tenté par l’apprentissage du vietnamien, du thaïlandais ou même de l’arabe, surtout pour leurs graphies si particulières. Encore me faut-il trouver un manuel qui ne me décourage pas au bout d’un mois …

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Le mot du jour : Idô

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Chaque année, pendant la deuxième moitié des mois de mars et de septembre, au travail on a notre ’mercato’ à nous. Pendant cette période les RH rôdent dans les bureaux et les supérieurs sont de mauvais poil, embarrassés d’avoir à faire des choix difficiles. Chacun est à l’affût de la moindre information, les rumeurs vont bon train … Plus personne ne travaille, c’est plutôt contre-productif en vérité.

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Afin que tout ne se fasse pas dans notre dos, au début du mois on nous a demandé notre avis ! Chaque employé, et ce quelque soit son grade, se voit envoyer un formulaire en ligne : ’Est-ce que mon poste actuel me satisfait ? Quel sont mes objectifs ? Est-ce que je souhaite changer de service ?’ Chacun remplit son formulaire en douce afin de ne pas vexer les collègues : Ouvertement avouer vouloir se faire muter, c’est un peu comme hurler ’je n’en peux plus de vous tous !’ au milieu du bureau.

Après de longues délibérations, les mutations sont généralement officialisées le 20. Ce jour-là chaque employé retient son souffle au moment d’entrer au bureau. A peine assis qu’un haut-placé débarque de nulle part : ’Tu as cinq minutes ?’ Tout le monde se regarde tandis que tu es entraîné vers une pièce à part … Certains supérieurs semblent prendre plaisir à ce petit jeu, comme ce type qui d’habitude ne t’adresse pas la parole mais qui ce jour-là viens vers toi pour … te demander un service. D’autres encore sont plus discrets, te donnent rendez-vous par téléphone.

Alors que la journée se poursuit et que la Terre continue à tourner, il suffit de voir les mines réjouies, les figures décomposées pour savoir qui va bouger ou non.

Quant à moi ? Cela fait 6 ans que je suis dans le même service, 3 ans que je demande à me faire muter, mais toujours rien. Il est vrai que je ne vaux pas 222 Millions de Yens ! On verra en mars …

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Le mot du jour : Hanbôki

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Chaque année ça recommence. Si aux alentours du 15 août la France a ses chassés-croisés sur les autoroutes, le Japon est lui aussi sens dessus-dessous durant l’O-bon, période durant laquelle -en principe ‘les gens des grandes villes retournent à leur ville natale et s’occupent des tombes de leurs ancêtres‘.

Selon les entreprises et les hasards du calendrier, les salary-men sont en congés payés pendant une période de 7 à 10 jours voire plus s’ils parviennent à faire le pont. Oui, vous savez maintenant pourquoi Paris, Madrid et Londres ou encore Guam, Hawaï et Séoul pullulent de touristes japonais à cette période ! Alors qu’un billet d’avion pour la Corée du Sud coûte un bras, ne serait-ce que m’imaginer le prix d’un séjour d’une semaine à Hawaï d’un père de deux enfants me donne le vertige.

Et pourtant, l’aéroport est plein à craquer. A tel point que nous ne sommes pas autorisés a poser congé. Et nous voilà donc à devoir face à des hordes de voyageurs arrivant en train, en voiture ou en bus. L’aéroport a cela de magique que le voyage commence avant même que l’avion décolle. Les voyageurs ne sont plus eux même, surtout quand ils voyagent en groupe ou en famille : Ca rit, ça parle fort, et parfois c’est la panique : ’Non, les 400 passagers de ce vol n’attendront pas sagement 15 minutes ton arrivée juste parce que tu as eu une panne de réveil !’

Hanbôki, en anglais, se traduit par ‘busy saison’. En français je serais tenté de traduire le tout par ’C’est la foire !’ Encore une semaine a tenir !

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‘Fallait pas m’quitter, tu vois. Il est beau le résultat’

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Admis !

Quel soulagement de ne plus avoir à trimballer mes lourds manuels ni à subir au quotidien la pression des examens ! J’ai beaucoup appris sur moi-même et surtout gagné en efficacité puisque l’on n’étudie pas de la même manière lorsque l’on est étudiant et lorsque l’on est père de deux enfants et travailleur à plein temps. Avec ces nouveaux ‘acquis’ je me prends à rêvasser à propos du prochain examen à passer, pour le plaisir cette fois.

Après deux mois passés à utiliser le moindre intervalle de 5 minutes pour étudier, la demie-heure de train pour me rendre au travail me semble interminable maintenant que je n’ai aucun objectif concret.

Au travail, cet examen n’est qu’une simple étape, et le commencement d’un paquet d’ennuis …

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‘Tu peux pas m’test !’

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Mon ete a passablement ete gache par quelque odieux examen que l’on me demande de passer dans le cadre de mon travail. Quand j’ai appris la nouvelle il y a de cela deux mois j’ai beaucoup rale. Mais bon, je suis adulte ( mais pas vaccine, oh que non, contre la betise ) et je me suis fait une raison. Non seulement je vais le reussir leur foutu examen, mais en plus je vais leur coller un sans-faute qui va leur clouer le bec !

Motive voire enrage, j’ai meme trouve le moyen de m’organiser un tant soit peu pour etre pret le jour J. Etudier dans le train ou le soir une fois les enfants couches, filer a la bibliotheque le matin les jours de conges. Au bout d’un mois d’etudes, je dois meme avouer que j’ai commence a (re)prendre gout aux etudes.

Je suis arrive serein a l’epreuve. Sur de moi et determine, peut-etre ai-je meme pu paraitre arrogant vis-a-vis de mes deux collegues qui passaient l’epreuve en meme temps que moi.

L’examen ( 70 questions a choix multiples ) commence plutot tranquillement. Surviennent quelques questions sorties de je-ne-sais-ou. Je panique, il me faut deux ou trois longues minutes pour reprendre mon calme. J’ai lu tous les livres en long, en large et en travers mais certains termes me sont completement inconnus, les tournures de phrases m’embrouillent. J’utilise pleinement les 80 minutes que dure l’epreuve et suis le dernier a sortir de la salle. Mes collegues sont sortis quinze minutes avant moi et ne m’ont meme pas attendus. Je suis completement lessive, je tente de verifier quelques reponses dans mes bouquins mais suis incapable de me souvenir des questions. Je saute vaguement dans un wagon, me traine de la gare jusqu’a la maison sous la pluie, un peu desespere. Sans-faute mes fesses, je ne suis meme pas sur d’etre tout simplement admis.

En 7 ans l’examen n’a ete rate que par deux personnes dans notre entreprise. Je vois deja d’ici deux ou trois personnes  intransigeantes me tomber dessus en cas d’echec. Le fait d’etre le premier non-asiatique de la boite a le passer ne me servira pas d’excuse ; On est au Japon et en tant qu’employe d’une boite japonaise ayant pour clients des japonais, je me dois d’etre aux meme niveau que les japonais. Point !

Les resultats seront divulgues vendredi. Alors j’attends.

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je paparazzie, tu paparazzies …

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L’un des choses amusantes lorsque l’on travaille dans un aéroport, c’est que l’on y croise tout un tas de célébrités. ‘Tout un tas’, j’exagère quelque peu puisque toute célébrité qui se respecte emprunte Narita ou Haneda. Du coup, nous a Nagoya, on n’a droit qu’aux miettes, aux stars internationales locales, comme par exemple la patineuse Asada Mao, les joueurs de l’équipe de baseball de Nagoya ou encore l’actuel entraîneur de l’équipe de foot, Stojkovic.

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– Euh … tu peux m’aider ? Je crois qu’il est brésilien.

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Mes collègues, surtout ceux du rayon des parfums et cosmétiques sollicitent assez fréquemment mon aide comme interprête lorsque le client ne comprend pas – ou ne veut pas comprendre – pourquoi on lui refuse d’acheter certains produits. Dans les faits il s’agit de restrictions résultant de la lutte anti-terroriste, et sauf cas extrêmes la plupart des clients n’y trouvent rien à redire, mais là n’est pas le but de mon propos.

Pour faire simple, mes collègues distinguent trois familles linguistiques : les langues asiatiques, l’anglais, et … tout ce qui n’est ni asiatique ni anglais. Du coup, une fois sur deux la langue que l’on me demande de traduire n’a absolument rien à voir avec celle dont on m’avait parlé à la base. Ainsi, le brésilien cité plus haut était en fait italien. Passe encore. L’autre jour un soi-disant français était en fait allemand et une fois même, un chinois en fait français. Pourquoi pas. Je comprends l’italien et parle allemand, on s’en sort encore.

Seulement parfois, rien à voir. Un soi-disant hollandais était en fait russe et un allemand mexicain. Je ne parle ni russe ni espagnol, et on a dû s’y mettre à trois pour lui faire comprendre ce que nous devions lui dire.

Vu autrement, ces trois catégories impliquent quelque chose d’affolant : Puisque je parle français, allemand et une langue aussi rare que le luxembourgeois, forcément, il est des personnes qui sont persuadées que je parle également l’italien, le finlandais ou même l’arabe. Mieux, ils oublient même parfois que certains occidentaux parlent parfois parfaitement japonais. Bien qu’occidentaux, dans certains cas le japonais est même la seule langue en commun que j’aie avec certaines personnes. Il m’est ainsi déjà arrivé de converser pendant 15 minutes en japonais avec un canadien.

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on se sent moins seul au pluriel

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Je m’imagine aujourd’hui tout seul ici. Ou plutôt, j’essayais de savoir ce qu’il serait advenu de moi avec le même travail si j’avais été seul. Serais-je devenu moi aussi un ‘hataraki man’, ou en bon français, un workaholic ? Ou, incapable de me lever en plein milieu de la nuit par un froid de canard, aurais-je déjà jeté l’éponge et changé de travail ? Peut-être serais-je peut-être même déjà rentré au pays ?

D’une part, je pense que je me serai investi encore davantage dans mon travail. Pourquoi rentrer alors que personne ne m’attend et que je suis payé pour ne rien faire ? Celui qui veut travailler trouvera des milliards de choses à faire, notamment tout un tas de statistiques sur tout et n’importe quoi. Ces calculs ne sont pas de la plus haute importance, au début je m’en servais surtout pour meubler les périodes creuses pendant lesquelles les clients se font rares. Puis en fait de compte, comme quinze ans plus tôt lorsque je calculais par exemple le temps de trajet moyen en bus de la maison jusqu’à l’école ( 22 minutes et quelques ) ou la moyenne de mes notes sur l’intégralité de ma scolarité ( 7.36/10 ), j’ai repris goût à ce genre de bêtises et me retrouve parfois presque à regretter de devoir rentrer chez moi. Et puis d’un autre côté il y a ces journées où tout me gonfle, où je n’ai qu’une envie, c’est de rentrer à 16h00 piles, et d’ailleurs, dans ces cas-là c’est ce que je fais.

Si j’avais été seul, j’aurais probablement déjà abandonné ce travail, j’en suis pratiquement certain. J’aurais été serveur ou caisser tout près de chez moi, et tel que je me connais, j’aurais probablement déjà acheté toutes les consoles de jeu sur le marché et claqué l’autre moitié de mon salaire en cds et en repas à droite à gauche parce que j’aurais trop eu la flemme de me faire à manger. Au bout d’un an, j’aurais craqué, serais rentré au pays, trouvé un emploi bien payé mais sans aucun rapport avec le japonais. La boucle serait bouclée, retour à la case départ, décembre 2001.

Bref, merci !

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vivement lundi !

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Parfois, avoir des horaires à la con un peu particuliers à quand même ses avantages. C’était par exemple déjà le cas ici, puis une nouvelle fois samedi dernier. Samedi, c’était le début des soldes. Les soldes, ici comme ailleurs, sont synonyme de grande foule, et la grande foule, plutôt que d’être emporté par elle, plus je peux l’éviter mieux je me porte. De plus, avec ma taille, il est relativement rare que le produit que je cherche soit épuisé, aucune raison donc de paniquer.

Aussi, une fois la tempête passée pendant le week-end, je débarque au centre-ville un lundi gris et pluvieux, comme tout lundi qui se respecte. Pas grand monde, je profite de l’occasion pour revoir une vieille connaissance. Tournée rapide des magasins habituels, quelques achats qui me permettront comme à chaque fois d’être tranquille pendant les 6 prochains mois, puis retour à la maison juste avant le grand rush de six heures.

Voilà que je me surprend en train d’être content de me lever à 5h du matin le dimanche …

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6 mois déjà !

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Demain, cela fera jour pour jour six mois que je travaille à Centrair, six mois que bien entendu je n’ai pas vu passer. Si l’on fait un premier bilan, je reste sur ma première impression. Ereintant, mais passionnant. Pas mal de difficultés et de pressions. Des horaires pour le moins spéciaux, devoir se lever en plein milieu de la nuit un dimanche matin. Perdre toute notion de semaine, de week-end. Travailler dans une langue qui n’est pas la sienne, impératifs de temps ( les clients n’ont qu’un temps limité pour effectuer leurs achats ), de vente ( tout fonctionne par objectif à atteindre ), le fait qu’en cas d’erreur de notre part le client ne puisse pas venir changer son produit contre un autre, qu’il lui est impossible de venir réclamer la monnaie qu’on ne lui aurait pas rendue etc. Avoir affaire à des clients qui ne parlent ni anglais ni japonais, à des clients qui, du fait qu’ ils rentrent au pays, n’ont pas toujours le moral au beau fixe et d’autres encore qui du fait d’être riches se croient tout permis. Des collègues plus ou moins sérieux, plus ou moins jaloux et des petits-chefs. Beaucoup de paperasse, de contrôles, de temps perdu en détails, en choses qui ne servent à rien.

Et d’un autre côté, quoi de plus international qu’un aéroport ? La possibilité de pratiquer plusieurs langues chaque jour, de rencontrer une multitude de clients. Sympathiser avec certains clients réguliers, bavarder avec des pilotes. Etudier des bribes de chinois et de coréen chez soi et les mettre en pratique le lendemain sur son lieu de travail. Traduire, interpréter, téléphoner à Hong Kong, écrire en Allemagne. Regarder passer les gens, rêvasser un peu. Avoir envie de partir à l’étranger à son tour.

Au travail il m’arrive parfois de drôles de choses, parfois il n’arrive rien du tout. Outre des progrès en japonais, je pense que le principal changement est que je suis peut-être enfin parvenu par le biais de ce travail à gagner un petit peu confiance en moi à travers le regard des clients et de mes supérieurs. De plus, l’aéroport est tout jeune, tout change, bouge très vite, et finalement assez ouvert et auto-critique, ce qui donne l’impression à chacun de pouvoir, s’il le souhaite, apporter sa pierre à l’édifice.