Kôyô 2022 – épisode ‘その他’ – Sakae, Naka-ku, Nagoya

sakae habits
sake skateboard
ombres d'arbres sur bâtiment
Sakae Nadya Park

Bien que nous soyons début novembre il fait encore autour 20 degrés et je passe la majeure partie de mes journées de congés dehors en T-shirt, comme pour emmagasiner le plus possible de chaleur avant que ne vienne cette détestable période de l’année où je ne vois presque pas la lumière du jour. En matinée celle-ci est douce et agréable, même à midi le soleil est bas et projette des ombres inhabituelles sur les bâtiments alentours.

Je me suis garé à Osu et marche en direction de Sakae. Je me retiens de prendre encore des photos à Osu afin de ne pas saturer, et j’en pars avec la photo de ce papy qui semble s’être figé exprès pour se faire passer pour un mannequin parmi tout les vêtements colorés de seconde main. Je m’attarde à l’un des nombreux Skate Park aménagés sous l’autoroute. Quelques jeunes s’y exercent, je sors mon appareil, un peu hésitant à prendre des inconnus en photo. L’un d’eux vient m’adresser la parole de façon tout à fait amicale, m’explique très brièvement qu’il prend des photos lui aussi, puis reprend ses acrobaties, comme une invitation à le prendre en photo, mais pour être franc je suis plus intéressé par les ombres que forment au sol chacun de ses mouvements.

Je reprends mon chemin. J’ai déjà bien entamé ‘What we do for others‘, le troisième album du compositeur et producteur autrichien Oliver Thomas Johnson, mieux connu sous le nom de Dorian Concept. Si je le trouve sur le coup plutôt moyen dans l’ensemble, même après trois écoutes c’est un album dont je ne comprends pas vraiment la structure. Peut-être lui manque-t-il un titre accrocheur comme avaient pu l’être les (d)étonnants J Buyers et Eigendynamic des albums précédents. J’apprends plus tard en lisant la page de l’album sur Bandcamp que les pistes de chaque titre ont été enregistrées en une seule prise et que Johnson s’est efforcé d’être moins méticuleux lors de sa production. C’est probablement le côté brouillon, qui contraste avec la chaos maîtrisé des albums précédents qui me dérange quelque part.

J’ai fait aujourd’hui le déplacement jusqu’à Sakae pour faire un tour à la librairie Maruzen et jeter un oeil sur le livre de Daisuke Tajima, BEYOND THE LINES, sorti le 9 novembre. Ce jeune illustrateur m’obsède depuis que je l’ai découvert grâce à un billet de fgautron sur son blog, bien je n’aie jamais eu la chance de voir ses oeuvres autre part que sur internet. En vérité, c’est exactement le genre de dessins que j’aurai aimé faire moi-même. J’ai bien essayé deux-trois fois, avant même sa découverte, de reproduire sur papier des photos d’immeubles prises par mes soins, mais me suis à chaque fois vite rendu compte que cela nécessite une compréhension assez précise des principes de la perspective, et j’ai à chaque fois vite abandonné. Tajima représente en quelque sorte un autre moi qui aurait persévéré dans cette voie, et je me réjouis de le voir sortir son livre, un peu comme s’il s’agissait du mien. Je me demande bien quelle sensation cela peut donner d’être face à ses villes imaginaires dépeintes sur d’immenses posters de 3 mètres de haut. Tajima donnait récemment une exposition à Roppongi Hills, Tokyo, et je regrette un peu de ne pas avoir fait le déplacement alors que j’aurai peut-être même eu l’occasion de parler à cet alter-ego. Je me suis imaginé la situation mais n’ai cependant aucune idée de la façon dont j’aurai entamé la conversation. Malheureusement, le livre n’était pas -ou déjà plus- en stock. J’hésite maintenant entre le commander ou bien attendre d’avoir le plaisir de tomber dessus lors d’une prochaine tournée des libraires.


Comments ( 5 )

  1. Frederic
    Salut mahl, très belle série et bonne idée de travailler sur les ombres! J’ai une préférence pour la dernière photo car j’aime beaucoup les formes géométriques très marquées du bâtiment qui sont encore renforcées par le noir marqué des ombres. Je suis allé à Roppongi Hills cet après-midi pour faire le curieux et voir si ils avaient le livre de Tajima pour le feuilleter. Ils ne le vendent pas dans la librairie du musée accolée à la galerie où il devait être exposé un peu plus tôt cette année. Ils vendent d’ailleurs de moins en moins de livres dans cette librairie et même plus les catalogues des expositions passées. Il était par contre en trois exemplaires au Tsutaya. Malheureusement, tous les exemplaires étaient emballés de plastique et on ne pouvait pas voir l’intérieur. Le format est assez grand ce qui est une bonne chose vue la minutie de l’oeuvre, mais le volume ne me paraissait pas très épais pour le prix. Bon dommage, j’aurais bien voulu voir le rendu imprimé.
    • mahl
      Salut et merci pour ton commentaire ! Les librairies ne vendent plus de livres et les disquaires sont devenus des lieux de regroupement pour groupies de boys band ! Pour le livre de Tajima, je ne l'ai toujours pas trouvé, il faudra sans doute me le faire livrer au magasin. Je pense me l'offrir pour Noel mais j'aurai quand même aimé y jeter un oeil avant pour avoir une idée de sa taille - et le prix est quand même conséquent. Je m'imagine déjà le feuilletant doucement en écoutant un bon disque. Qu'est-ce qui irait bien avec ... ?
  2. Frédéric
    Salut! Ta réflexion est très juste et je me suis demandé où on allait si la librairie du musée de Roppongi Hills ne vendait même plus les catalogues des expositions qui s’y sont déroulées. Acheter en ligne est bien pratique mais extrêmement ennuyeux. Rien ne vaut les découvertes inattendues dans une librairie. Je dis ça mais je suis aussi fautif, allant également moins souvent dans les librairies qu’il y a quelques années. J’étais en tout cas content de trouver le week-end dernier ce numéro de Casa Brutus sur le nouveau parc Ghibli, avec Aimyon (j’aime bien cette série du magazine avec Aimyon, après le numéro sur Taro Okamoto). As tu l’intention d’aller au parc Ghibli d’ailleurs? J’imagine que les places sont déjà réservées pour les trois prochaines années… Ah très intéressante question de savoir quelle musique irait avec ce recueil de Tajima. Ça m’a fait un peu réfléchir, du coup. Je ne mettrais pas du rock de toute façon car ça ne serait pas très compatible avec la rigueur géométrique de son œuvre. Alors, je me tournerais plutôt vers des sons électroniques. En regardant ma discothèque personnelle, me vient d’abord en tête le morceau Alive d’ARCA (sur Mutant) pour la complexité structurelle, puis Parhelic Triangle d’Autechre (sur Confield) pour la noirceur, la répétition de formes qui s’enchevêtrent et une certaine notion d’espace (et le titre évoquant la géométrie). Mais, je me tournerais en fait plus vers le long morceau Dark Sea de Chihei Hatakeyama (sur The Bull Head Emperor) car c’est une musique drone aérienne à la fois sombre et lumineuse. Ça me donnerait l’impression de voler doucement au dessus de ces immeubles pleins de perspective. Enfin, bon ça reste extrêmement subjectif…
    • mahl
      Salut ! Merci d'avoir réfléchi sérieusement à la question. Je vois très bien ou tu veux en venir avec les morceaux que tu as choisi. Le morceau de Hatakeyama, est absolument exquis. Je me vois bien, en l'écoutant, quelque part en haut d'une montagne, dominant cette ville immense, et voir le soleil se lever au loin.

      L'exercice a été très intéressant, non pas forcément musicalement, mais dans la manière dont ma réflexion s'est acheminée. La première chose qui m'est venue à l'esprit est la BO de Ghost in the Shell. Le dessin de Tajima n'est pas forcément futuriste mais les dimensions improbables des bâtiments me font penser qu'il ne peut s'agir que de ville du futur proche. J'y collerai volontiers le titre Nightstalker, en m'imaginant, comme dans la scène du film, rouler au milieu de la ville, de nuit, avec ses néons se reflétant sur les vitres de la voiture. La scène, anodine pourtant, m'avait à l'époque profondément marque, et en la revoyant je me dis que les bâtiments de Tajima y auraient leur place ...

      Comme toi j'ai ensuite immédiatement pensé à Autechre, pour le côté géométrique et millimétré. J'ai passe en revue quelques albums mais me suis dit que l'on pourrait y coller n'importe quel titre - mis à part Gantz Graf, bien entendu. Je me suis finalement décidé pour Vi Scose Poise sur Confield. C'est par la que j'ai découvert Autechre, et l'aspect très métallique, le son de cloche irrégulier y colle assez bien. J'ai l'impression de voir la ville de haut, non pas de mes yeux, mais via ceux d'un drone, avec l'image qui saute parfois de quelques frames, revient en arrière, puis repart de plus belle, imprévisible, comme la musique d'Autechre. Il s'agirait plus du son du drone que de la ville, en quelque sorte (rires).

      J'y ai ensuite collé Cozen de Kyle Bobby Dunn, comme une ville dont les grattes-ciels seraient partiellement cachés, au loin, par une brume qui se dissiperait tout doucement. Puis je me suis dit qu'il fallait finir sur quelque chose de plus aérien, comme si l'on planait silencieusement au dessus de la ville. Il y bien My cloud de Jamiexx, adéquat mais un peu trop facile. Plutôt Ayr de Bicep, par exemple, ou bien encore Otomo, de Bonobo, sur son dernier album. Il m'a semblé important d'y ajouter un brin de voix humaines, il s'agit de villes après tout. Les dessins sont en noir et blanc, cela leur donne un aspect plutôt froid, un peu de 'chaleur humaine' ne fera pas de mal. Des voix, mais pas de paroles, afin de ne pas donner d'informations sur son lieu ...

      Quoiqu'il en soit, cela fait beaucoup de spéculations pour un livre que nous n'avons même pas sous la main (rires). Je me demande ce que Tajima penserait si on lui proposait une bande son de son livre ! Ces divagations m'ont bien pris une heure ou deux, mais ce fut un bien agréable voyage. Encore merci de t'être prête au jeu ! Excellente continuation !

      ... J'allais oublier ! Non, je n'ai pas encore été au parc Ghibli. J'attends que cela se calme un peu, et pense revoir auparavant une bonne partie des films du studio pour mieux m'imprégner des lieux !

  3. Frédéric
    Salut! Oui, c’est vrai qu’on est bien inspiré par ce livre qu’on n’a pas encore ouvert. Je ne suis pas vraiment surpris mais on est sur la même longueur d’onde car j’ai aussi d’abord pensé à la musique de Kenji Kawai pour Ghost in the Shell. J’ai en fait le CD chez moi en France mais je n’ai jamais pensé à le ramener. Du coup, sur mon iPod, je n’ai que le thème principal, le dixième morceau intitulé Reincarnation. Je l’ai réécouté en pensant que ça pourrait correspondre comme ambiance, mais les voix très marquées me ramènent trop directement vers Ghost in the Shell. Le morceau que tu as sélectionné correspond mieux en effet. Cette guitare pleine d’écho m’a toujours fait penser à un condor survolant les montagnes escarpées de la cordillère de Andes (allez savoir pourquoi!?). Ce qui est amusant c’est qu’en cherchant un morceau qui correspondrait, j’avais cette image d’aigle (survolant de haut) qui m’est revenu et j’ai donc écouté le morceau An Eagle in Your Mind de BoC, sans finalement être complètement convaincu par une éventuelle correspondance. J’ai aussi penser aux barrières d’immeubles dans Akira que je mettais en image sur mon billet sur Tajima, mais la bande originale d’Akira est également trop directement liée aux images du film. Pour revenir à Ghost in the Shell, je vois bien cette correspondance avec l’univers de Tajima. La ville dans Ghost in the Shell est plus proche de Hong Kong (l’ancien quartier chaotique de Kowloon Walled City, peut-être) que de Tokyo, et les immeubles de Tajima me semblent également être plus inspirés par Hong Kong que par une ville japonaise. En tout cas, on a bien tous les deux cette idée de musique aérienne et contemplative! Merci pour ces conseils, j’aime beaucoup ce morceau de Bicep par exemple.