Le barrage de Habu (羽布ダム) est un barrage d’irrigation de 62.5 mètres de haut construit en 1962 qui borde le lac artificiel Mikawa (三河湖), situé dans la ville de Toyota. Les alentours du lac ont récemment été réaménagés, on peut parcourir à vélo ou en voiture les 16km autour du lac, s’adonner à la pêche à l’étang de pêche sur pilotis ou bien encore louer un petit bateau pour une heure. Bien que nous ne soyons même pas en altitude il fait autour de cinq degrés de moins qu’en ville. Nous ne sommes qu’à une heure de voiture de chez nous mais j’ai l’impression d’être bien plus loin, quelque part dans la campagne de la préfecture de Nagano.
Courte balade en partant de la gare de Jingūmae (神宮前駅) toute proche du célèbre sanctuaire d’Atsuta, au sud de Nagoya. J’ai aujourd’hui pour objectif un gigantesque complexe d’appartements de type manshon(マ ン シ ョ ン) situé un kilomètre au sud de la gare. J’aurai très bien pu descendre à la gare de Toyoda Honmachi qui en est plus proche, mais j’ai envie de voir grossir peu à peu le bâtiment au fur et à mesure que je m’en approche. De la gare je marche comme d’habitude complètement au hasard. Cela doit faire quelques années que je ne suis pas venu dans les parages mais je me souviens très précisément de plusieurs photos prises à tel ou tel endroit. Finalement je suis comme inconsciemment guidé par mes souvenirs, je me surprends à vouloir prendre le même trajet que lors de ma balade précédente afin de voir en quelle mesure le paysage a changé, sans me rendre compte que cela n’empêche de faire de nouvelles découvertes en passant par des rues encore inexplorées. Pourquoi ressens-je fréquemment le besoin de revenir en des lieux qui me sont connus ? Pourquoi tiens-je autant à vouloir immortaliser le changement autour de moi, est-ce à force de tout noter dans mes carnets et sur mon blog que m’est venue cette obsession, ou bien est-ce l’inverse, me sens-je obligé de tout noter afin de ressentir ce changement ? Et pourquoi cela me semble-t-il si important ?
Tandis que je nage dans mes réflexions j’arrive à destination mais mes pensées ont comme consumé l’intégralité de mon énergie et je m’aperçois également que j’ai oublié de prendre une vue d’ensemble du bâtiment. Maintenant que je suis là – au pied du mur ai-je envie de dire, autant en prendre en gros plan cette fascinante façade nord qui fait quinze étages de haut, et dont les fenêtres et les poutres de béton qui renferment les cages d’escaliers et les ascenseurs semblent verticalement et horizontalement se répéter à l’infini me captivent. Je me sens obligé de laisser dans le cadre la numérotation des blocs pour montrer qu’il ne s’agit pas d’un copier-collé. Un peu comme Daisuke Tajima et ses fresques gigantesques il me plairait de trafiquer les images de sorte qu’elles se recoupent parfaitement et de les faire imprimer sur du papier de qualité supérieure afin d’en faire un poster qui recouvre l’intégralité d’un mur.
Attendre, le 14 février à 14h02, à l’endroit indiqué ! Je ne peux m’empêcher de penser que sur la première photo de cette série, la flèche que forme l’ombre sur la façade de cet hotel a dix minutes à quelques minutes à pieds de la gare de Nagoya pointe vers la fenêtre de la chambre qui mène à résoudre la clé de quelque énigme.
J’ai ces derniers temps une fascination pour les façades de bâtiments et surtout leurs fenêtres – qu’elles soient ouvertes ou fermées. J’aime y déceler les petits désordres du quotidien, les rideaux entrouverts, les vêtements qui tentent de s’enfuir ou encore, plus simplement, la lumière des néons. Ces observations me permettent de garder les yeux rivés vers le ciel au lieu de les baisser vers le sol.
Mi-avril déjà … Sans que je m’en rende trop compte, plus d’un quart de l’année est déjà entamé. Sur le plan personnel, entre le travail et tout ce qui tourne autour de la scolarité des enfants – concours d’entrée au collège et au lycée, annonces des résultats, inscriptions, cérémonies de remise des diplômes et cérémonies d’entrée, voilà un mois que je n’ai pas eu le temps de souffler. Si je suis bien conscient que tout ce long et épuisant processus pourrait faire l’objet de plusieurs articles de blog qui serviraient éventuellement aux francophones qui vivent ou vont vivre au Japon avec des enfants ou bien aux curieux qui s’intéressent au sujet, je n’arrive pas à me convaincre à l’idée de faire de ce blog une sorte de guide de la vie quotidienne au Japon, même si je me dis parfois que ce serait plus simple pourtant car les faits sont réels et il n’y a rien à inventer.
La floraison des cerisiers étant légèrement plus tardive que l’année précédente, nous avons pu entre deux cérémonies réussi à aller contempler ceux-ci par deux fois. Les quatre premières photos ont ainsi été prises dans la ville d’Iwakura (岩倉市), petite ville paisible située au nord de l’agglomération de Nagoya. Iwakura est coupée par la rivière Gojō (五条川), au bord de laquelle sont plantés sur une longueur de 7.6km pas moins de 1,300 cerisiers. Je ne me suis jamais amusé à les compter mais c’est aux abords de la gare d’Iwakura que leur concentration est la plus dense. L’endroit est mentionné dans le Sakura Meisho 100 Sen (さくら名所100選), classement référençant les 100 plus beaux lieux du Japon pour admirer les cerisiers en fleurs, et il faut bien avouer que ce soit vus du dessous en marchant le long de la berge qui borde la rivière ou bien à partir des ponts qui traversent celle-ci, on en prend avec un ravissement certain plein les yeux de toutes ces nuances de blanc et de rose dans les cerisiers mais aussi avec ces pétales tombées flottant sur l’eau.
Les deux photos suivantes ont été prises au Yokkaichi Sport Land (四日市スポーツランド), un agréable petit parc en bordure de Yokkaichi, ville industrielle située dans la préfecture de Mie auquel nous nous sommes souvenus être venus il y quelques années à la même saison. A Mie c’est déjà la rentrée scolaire, nous avons pratiquement le parc pour nous seuls et pouvons pleinement profiter du parcours d’obstacle qui fait le tour de la montagne et des cerisiers en fleurs en pleine éclosion. Pour finir, les deux dernières photos datent du même jour, et ont été capturées au retour de notre balade, à cinq minutes en voiture de chez nous.
Une nouvelle fois pour affaires à Tōkyō. L’un des rares avantages de mon changement de poste est qu’il m’amène à voyager plus souvent. Je me lève avant que le réveil ne sonne et quitte la maison en avance, j’arrive ainsi par un heureux concours de circonstances à la gare de Tōkyō une heure plus tôt que prévu. De là je suis supposé prendre le métro mais me perds dans la gare et me retrouve devant la sortie Marunouchi. Une rapide recherche sur mon smartphone du meilleur itinéraire jusqu’au lieu de rendez-vous près de la gare de Kōjimachi (麹町) m’apprend qu’il faut vingt minutes en métro et cinquante minutes à pieds, je me dis que si c’est pour me perdre à nouveau dans les dédales de la gare autant y aller en marchant. Selon l’application cela me fait arriver cinq minutes en retard mais il ne fait aucun doute qu’en marchant d’un bon pas j’arrive à l’heure. Il n’y a pas une minute à perdre, je me dirige donc d’un pas décidé en direction du palais impérial. La ‘balade’ autour du palais est très agréable par ce beau temps printanier et je me demande pourquoi je n’ai jamais eu l’idée de m’y rendre auparavant. Si j’ai souvent entendu que les cinq kilomètres que font le tour du palais étaient très populaire en tant que parcours auprès des adeptes de course à pieds, je suis très étonné par la proportion d’étrangers, non asiatiques notamment, qui s’adonnent parmi ceux-ci à leur footing matinal. Je les comprends tout à fait, l’un de mes premiers réflexes quand je me suis élancé pour ce parcours improvisé a été d’enclencher ma montre GPS pour garder une trace de cette balade. J’arrive au rendez-vous avec cinq minutes d’avance sur les autres avant tout le monde avec quelques gouttes de sueurs perlant sur mon front certes, mais maintenant complètement réveillé.
La suite de notre agenda nous mène à Omotesandō puis Harajuku. Je prends rapidement quelques photos par-ci par-là d’immeubles vus de nombreuses fois dans les pages du blog made in Tokyo, en expliquant à mes collègues que je suis amateur d’architecture, mais également que je tiens un blog et qu’il me faut donc de quoi alimenter mes pages. Comme souvent l’intérêt que ceux-ci porteront à mon blog n’est guère plus que poli, mais c’est comme ça. Notre tournée se termine enfin vers 16h autour de Ginza. J’en profite d’être dans le coin pour aller jeter un oeil au Ginza Sony Park, qui n’était pas encore ouvert au public quand j’y étais venu la dernière fois. L’endroit est très animé, au premier étage une chaîne de télévision est en pleine interview, quelques étages plus haut je remarque une file d’attente alignée en face d’un poster du groupe Hitsujibungaku (羊文学). Je pense tout d’abord qu’il s’agit d’un concert et jubile à l’éventuelle idée de pouvoir y assister, mais malheureusement il s’agissait d’une exposition à laquelle on ne peut participer que sur réservation. Je me repose un peu à la terrasse située au dernier étage en réfléchissant à quoi faire ensuite, marche encore jusqu’à la gigantesque librairie Maruzen Marunouchi. J’y entre à chaque fois avec la ferme intention d’y acheter quelque bouquin en langue originale de Paul Auster, pratiquement toutes les oeuvres y étant regroupées, mais suis à chaque fois rebuté par les prix exorbitants, et j’en sors une nouvelle fois bredouille. Après avoir longuement erré parmi les dédales de la gare de Tōkyō je trouve enfin le Traveler’s Factory Shop Tokyo, le flagship store de la marque de carnets de note Traveler’s Company dont j’utilise les carnets depuis maintenant plus de dix ans pour rédiger mon journal. L’endroit grouille de monde, l’engouement des clients pour la marque et tout ce qui est en rapport avec l’écriture fait plaisir à voir.
Je me suis éloigné de quelques centaines de mètres de la gare de Nagoya pour avoir une vue complètement dégagée sur les gigantesques constructions de verre que sont la JR Gate Tower (220m de haut) et la JP Tower Nagoya (196m). Le vent est violent, les nuages filant à toute vitesse se reflètent dans les surfaces de verre des deux immeubles. Vu d’en bas sous cet angle on pourrait croire qu’ils sont comme emprisonnés dans leur prison de verre et se meuvent à l’intérieur des bureaux au gré des courants d’air provoqués par la ventilation. J’imagine les travailleurs effectuant leurs tâches journalières, handicapés par une brume ou plus ou moins épaisse, et leur soulagement quand la météo annonce pour le lendemain un superbe ciel bleu sans nuages.
Il a fait très froid la semaine dernière, il a même neigé pendant la nuit. Comme souvent, la neige a disparu dans l’après-midi, laissant le temps aux enfants de s’y amuser pendant la matinée. Je dois ce jour-là me rendre de bon matin à Komaki (小牧), ville industrielle au nord de Nagoya. Peut-être parce que les montagnes sont toutes proches, le froid y est encore plus vif qu’autour de chez nous. Je pensais profiter d’être dans le coin pour faire un tour à l’aéroport de Nagoya, mais l’environnement hostile m’a bien vite découragé, c’est donc au centre de Nagoya que je cherche refuge. Alors qu’à son ouverture les gens faisaient la queue pour y entrer, je trouve immédiatement un siège de libre au Blue Bottle Coffee au premier étage du Chunichi Building, où je me réchauffe en dégustant un double expresso au goût très prononcé qui me rappelle celui bu dans les cafés lors de mon séjour en Europe le mois dernier. J’attends ainsi patiemment l’ouverture de la libraire henn books (ヘンブックス), situé à quelques blocs de là. Les publications de cette librairie ont commencé à apparaître sur mon fil Instagram il y a deux mois et l’algorithme m’a eu à l’usure. Il n’en est fait aucune mention nulle part mais je ne peux m’empêcher de penser que le ヘン (henn) provient de d’idéogramme 変 qui se lit signifie hen et signifie changement, étrange, fait qui attise grandement ma curiosité.
L’entrée de l’immeuble est tellement discrète que je passe une première fois devant sans la remarquer. Un étroit corridor, au bout une cage d’escalier que l’on se sent obligé de gravir sans faire le moindre bruit tant l’endroit semble infréquenté. La librairie porte bien son nom sous bien des aspects. La forme de la pièce me fait penser à un hexagone dont chaque côté serait d’une taille différente. Le magasin est autonome, il n’y a pas de personnel et la caisse n’accepte que les moyens de paiements électroniques. Un petit écran répète en boucle une histoire de meurtre irrésolu sur un fond de musique mystérieuse. Les étagères remplissent jusqu’au plafond le pan de chaque mur et on y trouve tout ce que la littérature peut compter comme polars et autres romans mystérieux. Une place particulière est attribuée à Ranpō Edogawa (江戸川 乱歩, 1894-1965) qui est en fait la transposition en phonétique japonaise du nom d’Edgar Allan Poe (1809-1849) エドガー・アラン・ポー, Edogā Aran Pō) ainsi qu’à un certain Fuboku Kosakai (小酒井 不木, 1890-1929). Comme souvent lorsque je pars (involontairement) à l’aventure dans de nouveaux domaines tout semble se recouper en un seul point puisque je suis justement en train de lire une nouvelle de l’écrivain et traducteur Seiji Tanizaki (谷崎精二, 1890-1971), qui se trouve être le principal traducteur vers le japonais des romans de Poe.
Autant je connais Edogawa pour avoir lu en partie ses oeuvres en français et avoir notamment été marqué par ‘la chaise humaine’, je n’ai jamais entendu parler de Kosakai, bien qu’il semble avoir eu une influence non moins importante dans le domaine du roman policier puis de la science fiction au Japon. Apparemment celui-ci serait né en 1890 à Kanie dans la préfecture d’Aichi et aurait également vécu au Parc Tsuruma, non loin de la librairie. Me voila de nouveau avec nouvelles choses à découvrir …
今日は何か変だな (Kyo ha nani ka hen da na), drôle de journée. Hen, encore une fois … Voilà plus de deux semaines que je ne cesse d’écouter en boucle le titre ‘Movie Light‘ de la chanteuse Satoko Shibata (柴田聡子). Cette chanson a quelque chose d’ensorcelant … de bizarre. Elle est imprégnée à la fois de tristesse et de mélancolie, mais également de douceur, de chaleur et de lumière. En l’écoutant j’ai l’impression de danser un dernier slow avec un être aimé à la terrasse d’un café situé en bord de mer en sachant que nous devrons nous quitter pour toujours le lendemain. J’y aime beaucoup la ligne de basse tout en légèreté, la manière dont la batterie entre puis s’efface, la voix douce, par endroit susurrée presque, au point que la dernière syllabe de certains mots n’est qu’à peine perceptible. Apparue dans mes suggestions sur Last.fm par un froid matin d’hiver en me préparant pour aller au travail, cette chanson m’aura apporté un peu de chaleur et de réconfort pendant ce mois de février difficile. Movie Light est le titre qui ouvre l’album ‘Your favorite things‘ sorti l’année dernière, après une ouverture aussi grandiose et théâtrale la suite de l’album est a mon goût un peu fade, ou alors faut-il tout simplement attendre que la magie s’estompe pour y jeter une oreille attentive.
La brume épaisse, le paysage apparaissant au fur et à mesure que j’avance me fait penser à celle que l’on pourrait trouver dans un jeu de rôle. Curiosité des tiroirs de la mémoire – ou bien aidé par la fatigue peut-être, l’ambiance me fait me remémorer le fantastique début du jeu Ishtar 2 sur Amiga 500 alors que je n’y ai pas joué depuis au moins trente ans. Après avoir pianoté comme je le faisais alors dans le jeu mon itinéraire à travers la brume j’arrive à un croisement. Je n’hésite pas, je connais chaque chemin par coeur pour y avoir couru et fait du vélo pendant des heures durant mon enfance, les monstres et autres êtres extraordinaires qui s’y cachaient alors sont enfouis dans ces même poussiéreux tiroirs que j’ouvre au hasard au fur et à mesure que j’avance.
Le silence, total, est sublime, comme si j’étais seul au monde et que la brume absorbait tout son. Je prononce quelques mots, comme pour vérifier. Je m’entends bel et bien, mais bientôt les mots disparaissent et Cozen, l’envoûtant, vaporeux, interminable titre de Kyle Bobby Dunn se met à résonner dans ma tête pour remplir cet oppressant espace devenu trop silencieux. La nuit commence tout doucement à tomber. J’en suis attristé car cela signifie que cette agréable promenade touche à sa fin. Nous quitterons déjà ce lieu paisible le lendemain matin, le jour se lèvera trop tard pour que j’aie le temps à la fois de fouiller mes cartons et de me balader une nouvelle fois. Qui sait quand je pourrai revenir … ? C’est comme avec un sentiment de devoir accompli que je regagne la maison. Profiter de chaque instant.
Je quitte la maison vers 10 heures après m’être assuré dix fois de ne rien avoir oublié. Je suis largement en avance mais je ne sais de toute façon pas quoi faire de mon temps à la maison. Une fois à l’aéroport je mange un dernier copieux repas typiquement japonais. Si l’enregistrement des bagages se fait sans trop de complications au vu de ma situation, j’ai à faire face à un imprévu à l’inspection de l’immigration qui me prend 45 minutes, l’occasion une fois de plus de me féliciter d’avoir pris mes précautions. Voyage sans encombres jusqu’à Hong Kong en regardant l’animé Tokyo Godfathers (2003) de Satoshi Kon (今 敏). Je me rappelle avoir rencontré le réalisateur, décédé en 2010, à Paris en 2002 ou en 2006, dans le cadre de la projection de Perfect Blue, son premier film. Un dessin dédicacé de Mima, l’héroïne du film, doit même traîner dans les cartons à la maison, encore une chose précieuse qu’il me faudra ramener un jour. Cinq heures d’escale, soit assez de temps pour me balader dans le gigantesque aéroport et espionner les boutiques de marque rivales. Départ pour Paris après minuit, je somnole vaguement deux heures à peine assis. Trop éloigné de la fenêtre il m’est impossible de contempler l’apaisant néant d’une nuit noire sans lune, je regarde les films ‘Kneecap‘ et ‘Upstream‘ (逆行人生) pour faire passer les interminables douze heures restantes. Premier vol sur un A350. Très silencieux mais plus étroit que je ne le pensais, les genoux pratiquement enfoncés dans le dos du siège de devant.
Arrivée à Paris au petit matin. RER, temps gris et graffitis. J’achève deux heures à la Gare de Lyon en prenant mon premier repas : charcuterie et café serré, tel un vrai touriste. Suivent deux heures de TGV à travers la campagne. Petites routes, petits villages, petites églises et vastes champs. Pas une montagne ! Incident – Comme dans un film, me dis-je – lors du contrôle des billets des deux passagères assises trois sièges devant moi : – Vous n’avez pas moins de 27 ans vous …’ Je réfléchis, pour me maintenir éveillé, à la manière dont comme dans son roman ‘La modification‘, Michel Butor aurait décrit la scène dans ses moindres détails sur une quinzaine de pages. Dijon enfin. Encore un café, puis 30 minutes de trajet en voiture pour finalement arriver à destination. Cela fait maintenant plus de 36 heures que je suis debout mais il n’est pas question de dormir, encore moins de faire la sieste, je ne me réveillerai qu’au milieu de la nuit, soit trop tard, soit trop tôt, c’est selon. Il fait si froid qu’il est difficile de dire si c’est du givre ou de la neige qui recouvre les arbres, le temps est pire que tout ce que à quoi je m’attendais, mais au moins ne pleut-il pas. Ce climat me manque … le temps d’une semaine, j’en conviens.
J’entame cette nouvelle année 2025 avec quelques photos prises entre octobre et décembre du fascinant Mode Gakuen (HAL) Spiral Towers, tout près de la gare de Nagoya. Selon le temps qu’il fait et la position du soleil dans le ciel les panneaux triangulaires reflètent la lumière d’une manière différente. Une fois que l’on se sera éventuellement lassé de cet angle il suffira de se déplacer d’une dizaine de mètres dans n’importe quelle direction pour que le jeu de lumière change à nouveau. C’est un assez bel exemple de ce qu’est la vie en fin de compte. La roue tourne, et quand elle s’arrête sur la mauvaise case, que les choses ne vont pas comme elles le devraient, c’est à nous de nous déplacer afin de changer de perspective, de voir les choses sous un nouvel angle.
Entre mon changement de service au travail en avril et l’enfer de la préparation aux concours d’entrée au collège et au lycée des enfants (qui, quel que soit le résultat, semble enfin devoir prendre fin d’ici une dizaine de jours ) l’année 2024 est passée en un éclair. Malgré une manque flagrant de temps et de liberté par rapport aux années précédentes c’est à se demander comment je suis parvenu malgré tout à publier 39 billets, prendre une multitude de photos (dont une grande partie n’a pas encore publiée), gravir le Mont Fuji en juillet et finir le marathon de Matsusaka en décembre. Avec le recul je me dis que la rédaction du blog, les nombreuses balades appareil à la main et autres recherches sur des sujets divers que celle-ci implique ont été une échappatoire par rapport au tracas du quotidien. Le blog a tellement été une manière de m’évader cette année que même les habituels questionnements à propos de l’intérêt et/ou la nécessité d’en poursuivre la rédaction dont je suis généralement assailli pendant l’été ne m’ont même pas effleurés.
Un peu comme chaque année je ne suis pas parvenu à mettre à exécution de manière satisfaisante les nombreux projets que j’ai en tête, mais j’y travaille tout doucement. Ainsi, les lecteurs les plus attentifs auront peut-être remarqué l’apparition du menu ‘Contact/Lettres’ dans l’en-tête du site. Ce n’est encore qu’une ébauche mais je pense à l’avenir donner la possibilité de correspondre par courrier aux lecteurs intéressés par de tels échanges. Avant cela il me faudra dans un premier temps terminer le récit de l’ascension du Mont Fuji, qui m’a valu de nombreuses visites. Il y a une demande évidente pour une documentation précise sur le sujet mais cette manière de blogger façon ‘guide du routard‘ ne m’intéresse pas particulièrement car trop codée, trop carrée. Si jamais c’était à faire ce serait probablement plutôt en format vidéo, mais cette envie me vient sans doute de l’habitude de regarder les aventures de mes trailers favoris sur Youtube. Cela dit l’ascension du Mont Fuji a vraiment été une grande découverte et je me suis en tête, dans la mesure du possible, de le gravir dorénavant chaque année. Un peu dans le même ordre l’idée, en avoir terminé avec la course à pied pour cette saison va enfin me permettre de me focaliser sur le tracé du Tōkai Nature Trail (東海自然歩道) en Aichi, que j’ai l’intention de parcourir dans son intégralité cette année. Là encore je ne suis pas certain de la meilleure manière de documenter le tout mais je commence tout doucement à comprendre qu’au lieu de longuement hésiter pour finalement ne pas franchir le premier pas, il est encore préférable de me lancer quitte à rectifier le tir en route.
En fait cette année j’ai surtout – et ce quel que soit le résultat aux yeux des lecteurs – pris plus de plaisir à photographier qu’à écrire, et à priori la tendance devrait se poursuivre en 2025. Là encore, je m’organise peu à peu, notamment en établissant une liste des bâtiments et lieux que je souhaiterais visiter afin de ne pas perdre trop de temps à me décider où aller quand enfin j’en ai le temps. Je réfléchis également à l’élaboration d’une carte qui montrerait les lieux visités dont j’ai parlé sur le blog. Le tout devrait m’occuper pendant une, deux, cinq ou même dix années, au rythme où vont les choses …