Tag Archives

2 Articles

livres/Nagoya

Une dernière page et au lit ! – Meieki, Sakae, Nagoya

Posted on
Nagono Nagoya
temple et panneaux publicitaires
jardin
pause
chaises
chaises
auto-ecole
voiture de sport

Avec les fortes chaleurs de ses dernières semaines il devient difficile de sortir se balader. A 8h du matin il fait déjà presque 30 degrés et ce n’est qu’en ralentissant le rythme de course que je parviens encore à courir autour de 10km sans m’évanouir. J’entame donc le stock de photos prises ces trois derniers mois avec une série de huit photos proposant quatre thèmes que l’on s’amusera (ou pas) à y chercher. Il n’y a pas forcement de réponse correcte, on interprète les photos comme on le veut, c’est cela qui est amusant.

Si une expression japonaise dit ‘l’automne, saison de la lecture’, (読書の秋), assommé par la chaleur, ébloui par la lumière, à défaut de pouvoir faire autre chose c’est pour moi l’été que je lis le plus. Après avoir donc en guise d’amuse-bouche relu comme chaque année ‘La trilogie new yorkaise’ de Paul Auster dans une édition ‘Livre de Poche’ datant de 1997 que je garde précieusement, je viens de terminer de lire en japonais Shippū Rondo (疾風ロンド, 2013) de l’auteur de romans policiers Keigo Higashino (東野 圭吾). S’il se lit très facilement je n’ai pas été particulièrement convaincu par cette histoire (Un employé mécontent d’une université vole une arme biologique appelée ‘K-55’ et menace de la déployer à moins qu’une rançon ne soit payée, mais meurt dans un accident de voiture sans que personne ne sache où l’arme a été cachée …) qui de par ses rebondissements invraisemblables m’a fait penser à un mauvais film hollywoodien. Justement, celui-ci semble avoir été adapté en film en 2016 avec Hiroshi Abe en tête d’affiche et cela n’a pas l’air d’être fantastique. Rien d’étonnant donc à ce que l’on ne trouve pas sa traduction parmi les nombreuses oeuvres disponibles en français chez Actes Sud. Dans ma pile de livres,  à lire au frais en sirotant un café glacé j’ai deux oeuvres de Yōko Ogawa (小川洋子)(Petites boites et Jeune fille à l’ouvrage), Pays de neige, le chef-d’oeuvre de Yasunari Kawabata qui a surgi de nulle part après un peu de rangement, 4321 de Paul Auster, que j’ai fini par me payer en version originale, Dune de Franck Herbert, en français, acheté lors de mon retour au pays en janvier et que je n’ai pas relu depuis vingt ans, et pour finir un roman japonais acheté vite-fait l’autre jour, mystérieusement intitulé ‘Labyrinth of Hortensia and the Minotaur‘ (一次元の挿し木) de Ryūnosuke Matsushita (松下 龍之介).

En été je préfère également la radio ou les podcasts à la télé. C’est avec un ravissement certain que je retrouve le journaliste et écrivain Richard Gaitet dans son émission Bookmakers sur ARTE Radio. J’avais longtemps écouté son émission littéraire Nova Book Box lorsqu’il était sur Radio Nova, et Le prix de la page 111, ‘le plus absurde des prix littéraires‘, qui récompense chaque année la meilleure page 111 d’un roman de la rentrée littéraire et que Gaitet anime avec un enthousiasme contagieux, m’a définitivement convaincu que la littérature et son analyse peuvent être autre chose qu’une épreuve de commentaire composé. Au lieu de survoles les textes je me suis mis à lire plus attentivement, en prenant mon temps. On apprécie un texte ou pas, on s’arrête, on tente d’expliquer pourquoi. Un peu comme les pubs à la télé … Je suis en train d’écouter un à un les cent et quelques épisodes de Bookmakers, hier j’ai religieusement dégusté celui avec Daniel Pennac, dont je me souviens avoir lu adolescent l’intégralité de la Saga Malaussène avec un immense plaisir. Si j’aime beaucoup cette émission dans laquelle on découvre le cheminement qui amène à l’écriture, la voix de Pennac a quelque chose d’apaisant et ses mots font mouche, il parle comme il écrit, c’est sublime.

Je suis conscient que ce billet n’a pas grand chose à voir avec le Japon. Je cherche des émissions du même style, en japonais, à propos d’auteurs japonais, mais ne tombe que sur des formats carrés ou trop courts, des échanges soporifiques sans passion, comme si la littérature devait nécessairement être quelque chose d’ennuyeux.

architecture/livres/Nagoya

‘Marche à l’ombre’ – Atsuta-Jingū, Atsuta-ku, Nagoya

Posted on

Fin juillet. Il fait atrocement chaud mais je refuse pour autant de rester enfermé. Je trouve ainsi refuge parmi les nombreuses vastes allées ombragées par d’immenses arbres qui me semblent millénaires, au sein du sanctuaire Atsuta-jingū (熱田神宮), situé au sud de Nagoya.

Le sanctuaire Atsuta Jingū (sanctuaire d’Atsuta), est l’un des centres de culte les plus importants du Japon avec ses près de 9 millions de visiteurs par an. Construit sous le règne de l’Empereur Keikō (73-130), ce qui en fait l’un des plus anciens lieux de culte du Japon, il est dédié à la déesse du soleil Amaterasu, la plus sacrée du panthéon shintō. Le sanctuaire aurait été construit pour accueillir notamment le Kusanagi no Tsurugi (草薙の剣), le ‘sabre faucheur d’herbe‘ qui aurait été offert par cette même déesse à ses descendants, la famille impériale du Japon. Le sabre est l’un des trois trésors sacrés du Japon, avec le miroir de bronze Yata-no-Kagami qui repose au sanctuaire d’Ise dans la préfecture de Mie, et le bijou Magatama, conservé quant à lui au Palais Impérial de Tokyo. Ces trois reliques ne sont visibles que par quelques privilégiés, l’empereur et quelques prêtres de très haut rang.

Je me dirige sans trop réfléchir, comme attiré peut-être, vers le sanctuaire principal où je suis me suis rendu une demi-douzaine de fois de par le passé. Nous sommes bien loin de la foule qui s’y rue autour du Nouvel An, à peu près la moitié des visiteurs me semblent être étrangers. Juste après m’être levé les mains au chōzuya, je suis fasciné par un gigantesque camphrier. Il porte autour du tronc, qui fait plus de 7 mètres de diamètre, une banderole de papier plié en forme d’éclair signifiant qu’il y demeure une divinité. Faisant plus de 20 mètres de haut, partiellement recouvert de mousse, avec ses branches se tortillant vers le ciel et ses jeunes pousses faisant irruption des ses propres racines, il a effectivement quelque chose de solennel. Si j’avais bien entendu remarqué cet arbre majestueux auparavant, je lui porte cette fois une attention toute particulière après avoir justement fini de lire le livre de l’écrivain à succès Keigo Higashino (東野 圭吾), クスノキの番人 (The Camphor Keeper), dans lequel un camphrier magique a le pouvoir d’emmagasiner les voeux de ceux qui viennent y prier afin d’être transmis d’une génération à l’autre au sein d’une même famille. L’intrigue a un peu du mal à se mettre en place, avec ses 483 pages le livre est un poil trop long, mais dans l’ensemble je l’ai trouvé agréable à lire et je dois avouer avoir été surpris par le dénouement. Comme le trio d’arbres géants à Osu dont j’ai déjà parlé plusieurs fois dans ces pages, les camphriers ont vraiment quelque chose d’enchanteur et de prodigieux.

C’est donc dans cet état d’esprit un peu mystique que j’atteins le sanctuaire principal. Après avoir effectué une prière je traine autour du comptoir où sont vendus les amulettes porte-bonheur o-mamori. Du fond de la cour un jeune prêtre de grande taille tout vêtu de blanc s’avance à grands pas vers l’un des guichets et s’y assoit, et bientôt une file d’attente d’une dizaine de personnes se forme. Il s’agit de la personne qui écrit les ‘go-shuin’, les sceaux donnés aux fidèles et aux visiteurs des sanctuaires shintoïstes ou dans les temples bouddhistes au Japon. Les sceaux sont souvent rassemblés dans des carnets en papier cartonné appelés shuin-chō qui sont vendus dans les sanctuaires et les temples. En réalité cela fait plusieurs années que je pensais m’en procurer un, j’attendais soit un coup de coeur, soit d’avoir l’occasion d’aller au Hikouki-jinja (飛行機神社), le sanctuaire dédié à l’aviation situé à Kyōto pour mettre la main sur le sublime carnet violet élaboré en collaboration avec la compagnie aérienne japonaise ANA. Celui d’Atsuta-jingū, de couleur vert sapin, avec sur la couverture un badge héraldique goshichi-kiri-mon (五七桐紋) et à l’arrière l’inscription Atsuta-Jingū en lettres dorées, est bien sobre, mais à quoi bon attendre ? Sans trop réfléchir je m’approprie mon premier shuin-chō et y fait inscrire mon premier go-shuin. Voilà encore une occasion supplémentaire de voyager a travers le pays …

Toujours sur mon petit nuage je reviens sur mes pas pour faire un tour à la nouvelle aire de repos Kusanagi Hiroba (くさなぎ広場), entièrement réaménagée puis ouverte au public en juillet 2021, et dont j’avais vu quelques photos dans le magazine d’architecture Shin-kenchiku du mois de mai. Je peine à me souvenir à quoi ressemblait l’endroit auparavant mais il me semble que l’entrée qui menait sur l’étang était discrète et que le petit restaurant où l’on pouvait déguster de délicieux plats de nouilles plates kishimen en surplombant l’étang n’avait lui non plus rien de particulier. Cette discrétion avait son charme, comme si connaître son existence donnait à lui seul l’impression d’être un initié, ce qui n’est pas rien étant donné la nature spirituelle du lieu. Economiquement parlant ce système n’est bien entendu pas viable, et les promoteurs ont vu grand pour cette rénovation. L’étang a été entièrement réaménagé, il y flotte un bateau en bois censé représenter la période prospère du quartier d’Atsuta, qui était autrefois l’un des 53 juku (stations) de la route Tōkaidō mais également un port. On y trouve également un musée consacre au sabre Kusanagi que je n’ai pas eu le temps de visiter, un magasin de souvenirs et surtout le fameux restaurant, avec une grande terrasse en plein air, à laquelle je m’assois pendant une bonne heure durant, écrivant quelques lignes dans mon carnet puis contemplant mon premier sceau go-shuin dans son nouveau carnet et réfléchissant déjà aux nombreuses promenades qui s’annoncent.