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livres/musiques/Nagoya

今日は何か変だな(freezing cold) – Komaki & Sakae

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Il a fait très froid la semaine dernière, il a même neigé pendant la nuit. Comme souvent, la neige a disparu dans l’après-midi, laissant le temps aux enfants de s’y amuser pendant la matinée. Je dois ce jour-là me rendre de bon matin à Komaki (小牧), ville industrielle au nord de Nagoya. Peut-être parce que les montagnes sont toutes proches, le froid y est encore plus vif qu’autour de chez nous. Je pensais profiter d’être dans le coin pour faire un tour à l’aéroport de Nagoya, mais l’environnement hostile m’a bien vite découragé, c’est donc au centre de Nagoya que je cherche refuge. Alors qu’à son ouverture les gens faisaient la queue pour y entrer, je trouve immédiatement un siège de libre au Blue Bottle Coffee au premier étage du Chunichi Building, où je me réchauffe en dégustant un double expresso au goût très prononcé qui me rappelle celui bu dans les cafés lors de mon séjour en Europe le mois dernier. J’attends ainsi patiemment l’ouverture de la libraire henn books (ヘンブックス), situé à quelques blocs de là. Les publications de cette librairie ont commencé à apparaître sur mon fil Instagram il y a deux mois et l’algorithme m’a eu à l’usure. Il n’en est fait aucune mention nulle part mais je ne peux m’empêcher de penser que le ヘン (henn) provient de d’idéogramme 変 qui se lit signifie hen et signifie changement, étrange, fait qui attise grandement ma curiosité.

L’entrée de l’immeuble est tellement discrète que je passe une première fois devant sans la remarquer. Un étroit corridor, au bout une cage d’escalier que l’on se sent obligé de gravir sans faire le moindre bruit tant l’endroit semble infréquenté. La librairie porte bien son nom sous bien des aspects. La forme de la pièce me fait penser à un hexagone dont chaque côté serait d’une taille différente. Le magasin est autonome, il n’y a pas de personnel et la caisse n’accepte que les moyens de paiements électroniques. Un petit écran répète en boucle une histoire de meurtre irrésolu sur un fond de musique mystérieuse. Les étagères remplissent jusqu’au plafond le pan de chaque mur et on y trouve tout ce que la littérature peut compter comme polars et autres romans mystérieux. Une place particulière est attribuée à Ranpō Edogawa (江戸川 乱歩, 1894-1965) qui est en fait la transposition en phonétique japonaise du nom d’Edgar Allan Poe (1809-1849) エドガー・アラン・ポー, Edogā Aran Pō) ainsi qu’à un certain Fuboku Kosakai (小酒井 不木, 1890-1929). Comme souvent lorsque je pars (involontairement) à l’aventure dans de nouveaux domaines tout semble se recouper en un seul point puisque je suis justement en train de lire une nouvelle de l’écrivain et traducteur Seiji Tanizaki (谷崎精二, 1890-1971), qui se trouve être le principal traducteur vers le japonais des romans de Poe.

Autant je connais Edogawa pour avoir lu en partie ses oeuvres en français et avoir notamment été marqué par ‘la chaise humaine’, je n’ai jamais entendu parler de Kosakai, bien qu’il semble avoir eu une influence non moins importante dans le domaine du roman policier puis de la science fiction au Japon. Apparemment celui-ci serait né en 1890 à Kanie dans la préfecture d’Aichi et aurait également vécu au Parc Tsuruma, non loin de la librairie. Me voila de nouveau avec nouvelles choses à découvrir …

今日は何か変だな (Kyo ha nani ka hen da na), drôle de journée. Hen, encore une fois … Voilà plus de deux semaines que je ne cesse d’écouter en boucle le titre ‘Movie Light‘ de la chanteuse Satoko Shibata (柴田聡子). Cette chanson a quelque chose d’ensorcelant … de bizarre. Elle est imprégnée à la fois de tristesse et de mélancolie, mais également de douceur, de chaleur et de lumière. En l’écoutant j’ai l’impression de danser un dernier slow avec un être aimé à la terrasse d’un café situé en bord de mer en sachant que nous devrons nous quitter pour toujours le lendemain. J’y aime beaucoup la ligne de basse tout en légèreté, la manière dont la batterie entre puis s’efface, la voix douce, par endroit susurrée presque, au point que la dernière syllabe de certains mots n’est qu’à peine perceptible. Apparue dans mes suggestions sur Last.fm par un froid matin d’hiver en me préparant pour aller au travail, cette chanson m’aura apporté un peu de chaleur et de réconfort pendant ce mois de février difficile. Movie Light est le titre qui ouvre l’album ‘Your favorite things‘ sorti l’année dernière, après une ouverture aussi grandiose et théâtrale la suite de l’album est a mon goût un peu fade, ou alors faut-il tout simplement attendre que la magie s’estompe pour y jeter une oreille attentive.

musiques/Nagoya

‘Les temps, comme les oeufs, sont durs’ – Kanayama, Nagoya

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Je n’ai pas mis les pieds à Nagoya depuis plus d’un mois et les photos de cette série font partie des dernières photos prises en dehors de celles de l’ascension du Mont Fuji, qui suivront peut-être l’un de ces jours.

Après les avoir photographiées en novembre 2021, en mai 2022 et en mai 2023, je fais un détour pour voir dans quel état son ‘mes’ plantes près de la gare de Kanayama. Les plants en pots sur la droite semblent comme bousculés, oppressés, étouffés par une variété de plante sortie de nulle part, qui, prenant toute la place, les obligent à se pencher en avant, à pousser vers le sol, le dos courbé. De la haie aux contours hirsutes sur la gauche trois tiges grimpent le long du mur. L’une d’elles atteint désormais la fenêtre à l’étage, je ne peux m’empêcher de penser que dans un acte de voyeurisme délibéré elle tend son cou par dessus le rideau pour mieux y voir à l’intérieur.

Si je choisis ces photos après deux semaines sans signe de vie, c’est qu’elles sont assez représentatives de mon état actuel. Je suis bousculé en tout sens par tout ce qui se passe autour de moi, étouffé par la chaleur de ce mois d’août interminable. Amorphe, incapable d’entreprendre quoique ce soit, j’ai regardé dans des positions qui m’ont values de pénibles douleurs aux dos les épreuves des JO de Paris pendant des dizaines d’heures tout et scrollant des milliards de reels et autres vidéos débiles.

Le bilan musical de cet été est à peine plus glorieux. Si je ne devais citer qu’un seul titre, ce serait ナイトグロウ (Night glow) de l’artiste nommé 東京真中 (Tokyomanaka), dont le grain dans la voix et l’articulation particulière a retenue mon attention. Curieuse sensation que de clairement ressentir que cette voix a été trafiquée et n’est pas naturelle mais que cela lui donne malgré tout un certain charme. True Magic, album du producteur autrichien basé a Manchester Salute, est à peu près le seul album a avoir tourné en boucle. Les années passent et rien n’y fait, chaque été je ressens une irrémédiable envie d’écouter de la house music. Rythmes simples et entrainants, basses bien senties, qu’il s’agisse de She knows you de DJ Tonka en 1998 ou donc de ‘True Magic‘, chaque année la magie s’opère et le coeur se fait plus léger. Si rien n’est à jeter en dehors du titre ‘Go!‘, seul bémol en milieu d’album avec la rappeuse japonaise Minami Nakamura qui m’irrite les oreilles, ce sont les deux titres Saving flowers avec Rina Sawayama et surtout One of those nights, qui, tels des phares dans la nuit, me sauvent du naufrage.

Patience ! Septembre est au pas de la porte, les enfants vont retourner à l’école et je vais pouvoir reprendre une activité normale

musiques/Nagoya

Leave all behind – Kita-ku, Nagoya

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appartement délaissé
appartement délaissé

Juste un bloc derrière le NZU, un bloc constitué de quatre appartements, des logements sociaux proche de ceux que l’on pourrait trouver dans les banlieues de France, est complètement laissé à l’abandon. Lors de ma visite précédente il y en avait cinq, en quelques mois celui le plus au nord a été intégralement détruit puis reconstruit. Tout neuf avec sa façade blanche et marron, ce dernier ressemble à n’importe quel autre appartement du genre. Aucun intérêt.

J’ai quelques jours plus tôt écouté ‘Lives Outgrown‘, premier album solo de Beth Gibbons, principalement connue pour être la voix du groupe britannique Portishead. J’ai beaucoup de difficultés à donner mon avis sur cet album car j’ai l’impression de ne pas l’avoir compris. Ce n’est pas parce que l’album est de Gibbons qu’il doit forcement être bon, mais pour l’apprécier à sa juste valeur il me semble qu’il faille s’attarder dessus, écouter attentivement les paroles, prêter l’oreille à sa voix frêle, à ses chuchotements. En attendant d’être plus réceptif je réécoute d’une traite les trois albums de Portishead, comme pour faire le deuil de sa participation au groupe et mieux pouvoir appréhender Lives Outgrown. Bien que quatorze années séparent Dolls (1994) de Third (2008) on ne peut qu’être épaté par le fait qu’aucun morceau ne soit à franchement parler démodé ou ait mal vieilli. Si certains morceaux sont plus captivants que d’autres c’est uniquement parce qu’il sont sortis en singles et font partie de la mémoire collective, mais l’on pourrait sans peine s’accorder presque 150 minutes (car je viens de me rendre compte en vérifiant la durée des albums que chacun d’eux fait 49 minutes et quelques secondes) de bonheur musical sans être capable de replacer les morceaux dans leur ordre chronologique.

Au moment où j’approche des bâtiments de cette série de photos résonnent les premières notes de Roads, chanson emplie d’une certaine mélancolie qui à ce moment sied parfaitement à cet environnement. J’imagine l’endroit, pas si longtemps que cela encore, animé, les habitants bavardant sans doute des heures durant dans le square à l’ombre des buissons, toutes les conversations commençant certainement par ‘Mais quelle chaleur aujourd’hui !’ Les clients des petits magasins au rez-de-chaussée étaient tous des habitués, les enfants jouaient avec grand bruit dans le jardin jusqu’à ce que leurs mères hurlent, à partir du balcon, de rentrer souper. Les potagers étaient minutieusement entretenus et leurs propriétaires, tout fiers, se faisaient un plaisir de distribuer leurs récoltes aux voisins et aux proches. Les rosiers et les hortensias n’étaient jamais fanées et une douce odeur imprégnait les lieux.

musiques/Nagoya

‘Where I end and you begin’ – Shin-Sakae, Nagoya

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piercing board
maison envahie par les plantes
secte
cage d'escalier
vieille voiture dans magasin

Mes errances hasardes du billet précédent me font quitter le quartier d’Ōsu, où ont été prises les photos de cette série, pour celui de Shin-Sakae (新栄), situé à l’est du quartier de Sakae. Je n’y passe pas souvent car de fait il n’y a pas grand chose à y voir. Il s’agit d’un quartier qui dort le jour et vit la nuit, les rues sont sales et la plupart des immeubles tapissés d’immenses et immondes affiches de hosts (jeunes hommes à l’air accueillant et bienveillant dont le but est de soutirer un maximum d’argent aux clientes) imberbes au sourire Colgate. Alors que je crois avoir perdu mon temps je me souviens que le disquaire Disk Union se trouve dans le coin. Je n’y trouve pas grand chose si ce n’est en parcourant le rayon des vinyles j-pop une version vinyle du premier album de Shiina Ringo, Muzai Moratorium (無罪モラトリアム). Comme il fait la coquette somme de 60,000 yens (350 Euros) il ne me viendrait pas un instant à l’idée de m’en emparer, mais cela me fait tout de même me rappeler que j’avais parlé dans ces pages de l’ouverture d’un nouveau disquaire au Chūnichi Building, qui ne se trouve qu’à quelques encablures.

Le Face Records Nagoya se trouve au premier étage. Je m’attendais à trouver celui-ci au fond d’une galerie peu fréquentée et suis donc étonné de tomber dessus dés la sortie de l’escalator, en plein centre du hall, dans un espace ouvert sans vitres. La clientèle est très variée, cela fait plaisir d’en voir une bonne partie prendre en main un disque et échanger quelque souvenir, anecdote ou commentaire à son propos. Les bacs sont particulièrement fournis en vieux disques de pop japonaise des années 70 à 90 aux pochettes un peu kitsch mettant souvent en vedette, quand il s’agit d’une chanteuse, l’interprète en gros plan prenant un air rêveur ou insouciant. On pourra toujours se moquer des coiffures improbables de l’époque il n’empêche que certaines chanteuses sont indéniablement charmantes. Cela dit, mon regard est depuis tout à l’heure plutôt attiré par un disque d’un artiste qui m’est inconnu, mais dont la pochette présente le célèbre tableau du peintre américain Edward Hopper, Nighthawks (Rôdeurs de nuit, en français), une oeuvre que j’ai toujours adorée. Pour avoir écouté avec grand plaisir pendant de nombreuses heures les mix de funk, de jazz, de soul ou encore de city pop japonaise des années 70 et 80 sur la chaîne Youtube My Analog Journal, qui que soit ce Yoshitaka Minami (南佳孝) et son Seventh Avenue South, il est peu probable que ce disque soit complètement dénué d’intérêt, même si j’avoue que j’aurais préféré une voix féminine. De toute manière, ce disque servira dans un premier temps d’objet décoratif puisque je n’ai même pas de tourne-disque, à défaut de pouvoir accrocher un tableau de Hopper au mur, le disque trônera sur mon bureau. Je m’empare sans trop réfléchir de la galette pour 800 modestes yens (5 Euros), mais dans quoi ai-je encore fourré les pieds ?

architecture/musiques/Nagoya

‘It’s not Hong Kong. Not Tokyo. If you want to go I’ll take you back one day’ – Nagoya, Aichi

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buildings nagoya
buildings nagoya
buildings nagoya
buildings nagoya
buildings nagoya
buildings nagoya
buildings nagoya

Je me balade entre les quartiers d’Ōsu et Sakae. J’ai dans les oreilles 再生 – Saisei, le dernier album de la figure emblématique du hip hop japonais DJ Krush, sorti en février dernier et que j’écoute pour la quatrième ou cinquième fois cette semaine. Si cela doit faire plus d’une dizaine d’années que je n’avais pas écouté de nouveau morceau de DJ Krush, son saisissant ‘Candle Chant (A Tribute)‘ (sur l’album 漸 -Zen-, 2001) figure depuis au moins aussi longtemps dans l’iPod réservé à la voiture. La chanson a d’ailleurs très peu de succès quand elle apparait au hasard d’une balade en famille. L’instrumentation y est minimaliste et le flow de BOSS the MC du groupe Tha Blue Herb y est il faut l’avouer monotone, et les paroles qui relatent le décès d’un proche suite à son combat contre sa maladie, sont dures.

Je ne sais pas si je suis le seul à le ressentir ainsi, mais Saisei est à peine plus joyeux. Il pue la rue et le béton, avec un zeste de cyberpunk. Les deux premiers morceaux, et bien d’autres par la suite m’ont immédiatement fait penser à Chaos Theory (2005) d’Amon Tobin, et le fait d’être au milieu d’immeubles comme entassés les uns sur les autres me remémorent les scènes et la musique de l’une des plus belles vidéos de tout Youtube, produite par Timelab, dans laquelle un drone vole dans une Hong Kong qui brille de tous ses feux en rasant ses immeubles. Après quelques titres purement instrumentaux sont intercalés par trois fois, comme pour nous ramener à la réalité, des morceaux sur lesquels un rappeur vient poser son flow. Autant les deux premiers morceaux du genre sont quelconques que le troisième, 破魔矢 -Hamaya- feat. Jinmenusagi, de par sa qualité, n’a rien à envier au reste de l’album. Le flow rapide et rythmé de Jinmenusagi, parfaitement calé sur le beat, envoûtant, m’a fait penser à un moine récitant un mantra et je n’ai été qu’à moitié étonné de constater que le clip vidéo montrait effectivement DJ Krush aux platines dans un temple, son acolyte, comme en transe, récitant ses couplets. Par curiosité j’ai écouté son album DONG JING REN (東京人, 2023) mais les productions y sont trop fades pour que ce jeune rappeur au débit pour le moins extraordinaire ne me saoule au bout de quelques morceaux. J’ai pensé que cela ne mettait que plus en valeur encore le talent de DJ Krush, qui a su tirer profit de son potentiel.

architecture/musiques/Aichi

‘Mirror(s) mirror(s) on the wall(s) …’ – Toyota Municipal Museum of Art, Toyota, Aichi

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Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館
Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館
Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館
Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館
Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館
Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館
Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館
Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館
Toyota Municipal Museum of Art 豊田市美術館

Le Toyota Municipal Museum of Art, qui fait l’objet des deux derniers billets, est l’oeuvre de l’architecte Taniguchi Yoshio (谷口吉生). Si Taniguchi Yoshio est notamment connu comme étant le concepteur du plan de rénovation du Museum of Modern Art (MoMA) de New York, il a également travaillé sur des musées symboliques du Japon, dont celui de la ville de Toyota. Les jardins aux alentours du musée sont quant à eux arrangés par un certain Peter Walker, architecte du paysage a qui l’on doit le célèbre projet Jewel Changi Airport, complexe commercial en verre comportant en son sein la plus haute chute d’eau en intérieur au monde, et ce en plein milieu du septième aéroport mondial en termes de trafic aérien.

L’architecture du bâtiment est une oeuvre d’art à part entière, et je pense avoir passé au moins de temps à l’extérieur qu’à l’intérieur du musée. Il me semble que je pourrais passer la journée à me balader autour à contempler la manière dont les ombres se transforment au fur et à mesure que le soleil monte dans le ciel. A l’étage l’on découvre un plan d’eau et une curieuse installation, The Colors Suspended: 3 Exploded Cabin (3つの破裂した小屋, 2003), de l’artiste, peintre, sculpteur et plasticien français Daniel Buren : Trois cabines dont l’intérieur est respectivement bleu, rouge ou jaune. La façade extérieure est intégralement recouverte de miroirs et de chaque côté se trouve une ouverture d’où l’on peut entrer à l’intérieur. A quelques pas devant chaque porte se trouve une cloison faisant la taille d’une porte. L’une de ses faces est de la même couleur que celle de la cabane, l’autre face est à nouveau constituée d’un miroir. La lumière du soleil, le paysage environnant, le musée et les visiteurs se reflète de toutes parts, s’entrechevêtrent au point que je ne peux pas affirmer avec certitude ne pas apparaître dans le pan d’un ou l’autre miroir. J’essaie de découper les images, d’y insérer des personnes ou de faire coïncider les lignes de bâtiments différents.

J’écris ces quelques lignes en écoutant IRIS: A Space Opera, l’époustouflante performance du groupe Justice. Je possède le premier album du groupe ( † , 2007) mais je ne l’ai pas écoute depuis un bon bout de temps. Au fur et a mesure que les titres défilent parfaitement enchaînés je me rends compte que j’en attribuait un certain nombre à leur compatriote français Jackson And His Computerband (Smash, 2005). C’était alors l’âge d’or de la ‘French House‘, toute la clique du label Ed Banger produisait à foison, je m’y suis perdu en cours de route … J’ai pris énormément de photos de l’installation de Buren, me mettant au centre de chacune des trois cabanes et photographiant chacune des quatre sorties, puis, à l’inverse, capturant chaque cloison à plus ou moins la même distance de celle-ci. En écoutant le concert m’est venu à l’idée de créer une animation ou une video où ces photos s’alterneraient au rythme de la musique. Dieu seul sait si cette Nième idée verra le jour ou non …

musiques/vie du blog

Dans la tête de YI – Lalaport NAGOYA Minato AQULS, Minato-ku, Nagoya

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Je suis très rapidement déconcentré quoique je fasse à la maison, et cela vaut également pour la rédaction des billets de ce blog. Je m’assois à ma table haute, commence à rédiger quelque chose et au bout d’une demi-heure je suis déjà distrait. Le froid ou dernièrement la chaleur, mon regard qui se porte un instant sur un livre ou un magazine sur l’étagère, le voisinage qui bavarde longuement sur le pas de la porte ou encore une recherche ou la vérification d’une expression sur internet qui m’éloigne parfois bien loin de mon sujet … Tout prétexte est bon pour me faire passer à autre chose, c’en est parfois à un point où il m’arrive de me demander si au fond de moi j’aime vraiment ce que je suis en train de faire. Je fuis donc la plupart du temps la maison pour squatter ce que les environs comptent comme bibliothèques et cafés et ne m’explique pas le fait que je ne sois pas alors distrait par les gens autour de moi.

Mes pas me mènent à la librairie Tsutaya de Lalaport NAGOYA Minato AQULS, où il est permis de feuilleter livres et magazines en buvant son cafe. Alors que je traîne entre les rayons je crois entendre depuis tout à l’heure, à la suite, trois chansons du groupe サカナクション (Sakanaction). Si certaines chansons ont une certaine notoriété et passent parfois à la radio, certains des titres diffusés dans la librairie sont clairement des titres mineurs. Je remonte à la source sonore de ce remue-ménage et tombe sur une mini-exposition qui se tient dans la cadre de la sortie du livre du chanteur du groupe, Ichirō Yamaguchi (山口一郎).

J’avais bien sûr entendu parler du livre intitulé ことば – 僕自身の訓練のためのノート. Il s’agit d’une sélection, par thèmes, du journal personnel que Yamaguchi a rédigé entre les années 2001 et 2006. Yamaguchi a formé avec l’actuel guitariste du groupe, Motoharu Iwatera (岩寺基晴), le groupe de rock ダッチマン (Dutchman) en 1998. Je ne suis jamais parvenu à mettre les mains sur la musique interprétée à cette période, mais il est dit que les deux titres 三日月サンセット et 白波トップウォーター que l’on peut trouver sur le premier album de Sakanaction ‘Go to the future‘ (2007), ainsi que サンプル sur le deuxième album NIGHTFISHING (2008), étaient à l’époque déjà pratiquement achevés. En 2004 le groupe se sépare, Yamaguchi se retrouve seul puis est rejoint à nouveau par Iwatera l’année suivante. Le duo prend le nom Sakanaction malgré le manque d’enthousiasme d’Iwatera, et de fil en aiguille le groupe prend sa forme actuelle avec ses cinq membres.

Dans ses interviews et nombreuses discussions sur Youtube et Instagram Yamaguchi parle fréquemment de ces années comme étant difficiles du point émotionnel, et du fait qu’il écrivait à la fois pour remettre de l’ordre dans ses idées mais aussi comme un exutoire. Excité par le hasard de la découverte j’ai failli m’emparer du livre sans réfléchir, mais en y jetant un oeil je me suis rendu compte qu’il n’était pas fait pour moi. J’aime énormément la musique du groupe et apprécie beaucoup le personnage qu’est Yamaguchi mais ne pense pas être assez core fan pour vouloir m’immiscer à ce point dans son intimité, même si cela pourrait aider à comprendre encore davantage le contexte dans lequel ont pu être écrites et la manière dont ses expériences sont retranscrites dans les paroles ou même dans l’instrumentation des chansons. J’en lit quelques pages et comme je m’y attendais je n’y comprends pas grand chose. Les mots, les phrases sont cohérentes et stylistiquement soigné mais je ne parviens pas à les interpréter, à saisir leur signification, je ne vois que très vaguement où il veut en venir, sans explication du contexte c’est un peu comme si je lisais les mémoires d’un individu lambda. Une douche froide pour moi alors que justement je pensais mettre partiellement en ligne mes carnets.

musiques

Freedom Nagoya 2023 – Aichi Sky Expo, Tokoname, Aichi

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Le week-end dernier j’ai participé au festival de musique FREEDOM NAGOYA 2023, qui se tenait au centre d’exposition Aichi Sky Expo, juste à côté de l’aéroport Centrair. J’attendais ce moment avec beaucoup d’impatience car je n’ai plus été à aucun concert depuis une éternité. L’évènement se tenait sur une unique journée, une cinquantaine de groupes de rock se succédant dans les 3 halls B, C et D et une scène en extérieur. The 2 étant le seul groupe que je connaissais dans la liste j’avais au préalable écouté quelques morceaux de différents groupes pour me faire un idée de ceux à ne pas rater mais il me fallait tout de même laisser une part au hasard et en profiter pour faire quelques découvertes sur-le-coup.

Je commence les hostilités avec le groupe de punk rock バックドロップシンデレラ (Backdrop Cinderella). Il n’est que 10:30 mais les quatre membres sont déchaînés et jouent avec une contagieuse vitalité, une énergie digne d’un dernier set de festival sur la scène principale. Les chansons au rythme rapide mêlent punk rock et ska, en transe je participe timidement à l’un ou l’autre pogo (danse, bousculade où tout le monde saute et se pousse les uns contre les autres), le chanteur se jette fréquemment dans la foule et quelques personnes se font porter en l’air à bout de bras par le public. L’ambiance est phénoménale quoique bon-enfant, j’avais complètement oublié à quel point les concerts pouvaient être jouissifs ! Déjà je suis en sueur et je me dis qu’à ce rythme là je ne vais jamais tenir la journée.

On annonce autour de 20.000 visiteurs sur la journée, je me dirige rapidement vers l’un des nombreux stands yatai et m’en sors avec une petite-demie heure d’attente. J’y suis revenu plus tard autour de midi, les files d’attente s’entremêlaient, elles étaient tellement longues qu’il était difficile de savoir où elle se terminaient. Je suis toujours effaré par la patience des gens, il ne me viendrait pas à l’idée de faire une heure de queue rien que pour me prendre en photo devant le panneau à l’effigie du festival … Sur la scène au dehors jouent des groupes de rock sélectionnés sur audition. Les chansons manquent d’originalité mais l’ambiance est bonne, il souffle une légère brise rafraîchissante, ma bière est divine !

14:00 Je me retrouve par un concours de circonstances au live de ヤバイTシャツ屋さん (Yabai T-Shirts Yasan) dans le hall B, le hall principal pour cet évènement. Il s’agit probablement du groupe le plus connu de la journée mais leur prestation me laisse de marbre. Peut-être est-ce dû à l’acoustique de la salle (un simple hangar en fait) ou alors je devais être mal placé, mais la voix nasillarde de la chanteuse carrément incompréhensible, la surabondance d’aigus, les fréquents changements de rythme m’ont complètement perdus, je suis sorti de la salle plus agacé et sonné qu’autre chose …

16:30 Après avoir pris l’air pour me remettre de mes émotions, retour au Hall B pour le set de Age Factory. J’avais noté ce trio pop-rock originaire de Nara lors de mes écoutes en vue du festival et je ne m’étais pas trompé. Comparé aux groupes précédents le jeu de scène et le son font très pro, les refrains sont accrocheurs et le public chante en choeur. S’il y avait un peu moins de spontanéité que lors du set de Backdrop Cinderella, celui d’Age Factory était de très bonne facture musicalement parlant. A vrai dire le concert était tellement bon que quand j’ai par la suite écouté par la suite quelques titres du groupe ceux-ci m’ont semblé bien fades en comparaison !

17:30 The 2, au Hall C. Presque un concert intimiste comparé aux acts précédents. J’ai découvert ce groupe l’année dernière grâce à Ichiro Yamaguchi, le leader du groupe Sakanaction, dont il est le producteur sur leur deux derniers titres 恋のジャーナル (Koi no Journal) et ミスサンシャイン (Miss Sunshine), et j’avais bien accroché à leur live en streaming sur Youtube, au Ginza Sony Park. Parmi la liste de groupes en lice aujourd’hui Il s’agit du groupe dont je connais le mieux les chansons, je suis pris d’un ravissement certain quand je suis en mesure de reconnaître l’une ou l’autre chanson et de chanter en choeur sur leur titre ケプラー (Kepler). En raison de problèmes de santé le guitariste Ryōta Katō est absent, le leader du groupe Yutarō Furutachi se démène donc sur scène, jouant les parties solos de Katō retenues juste avant le concert. Les morceaux en sonnent un peu différents des albums, ce n’est peut-être pas plus mal ! En tout cas nous passons un excellent moment.

D’autres groupes se produisent encore sur les différentes scènes mais je suis exténué. Peut-être faudra-t-il venir en début d’après-midi la prochaine fois pour être en mesure de tenir le coup jusqu’au soir. Je me dis également qu’à l’occasion il faudra faire un tour aux live house à Nagoya, il y a un véritable vivier de groupes méconnus qui jouent avec leurs tripes. La scène musicale japonaise à encore de beaux jours devant soi !

musiques/vie du blog

ちっちゃな根性身につけたい – Kanayama, Nagoya

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”「がんばってみるよ」 優勝できなかったスポーツマンみたいにちっちゃな根性身につけたい。”
– Je vais faire de mon mieux ! Que j’aimerai avoir le tempérament d’un athlète, toujours fort même après la défaite.

Mes‘ plantes en pot n’ont, si j’ose dire, pas l’air dans leur assiette. Affaissées, comme brûlées par le soleil, elles semblent attendre un peu d’attention et des jours meilleurs. Le propriétaire doit être trop affairé pour s’en occuper ou avoir la flemme, sinon les deux. Ce n’est pas la grande forme de mon côté non plus, les idées et les mots ne me viennent pas, ou disons que je n’arrive pas à trouver le fil conducteur dans mes pensées et mes photos. Alors je tourne au ralenti et j’attends que cela se passe, ce blog m’a au fil des années appris que tout n’est qu’une histoire de cycles.

Les paroles ci-dessus sont tirées (et traduites à ma sauce) de la chanson カルアミルク(Kahlua Milk, du nom du cocktail) du groupe クラムボン(Clammbon) sur son album de reprises de chansons populaires, LOVER ALBUM (2006). Le titre original, interprété par Yasuyuki Okamura (岡村靖幸), date de 1990. On n’entend aujourd’hui plus cette façon particulière de chanter et si la texture sonore sommaire voire minimaliste devait sans doute avoir quelque chose d’avant-gardiste pour l’époque, la chanson a aujourd’hui un petit air rétro qui n’est pas désagréable même si je lui préfère largement la version de Clammbon. En faisant quelques recherches je tombe sur une reprise par DAOKO. Elle y reprend en quelque sorte la manière de chanter de Okamura, mais je n’en aime pas l’orchestration, trop sophistiquée avec ses touches de violon et le piano trop présent. Les paroles de cette chanson sont à la fois simples mais très imagées, au point que je me demande aujourd’hui si ce morceau ne m’avait pas particulièrement marqué tout simplement parce que j’en comprenais pour une fois le sens des paroles. La version de Clammbon me semble en ce sens beaucoup plus agréable à écouter.

En poursuivant mes recherches j’apprends que DAOKO et Yasuyuki Nakamura ont collaboré sur un titre intitulé ステップアップLOVE (2017), une chanson très catchy et qui je pense se revendique tant que tel en commençant d’emblée avec le refrain. A l’écoute de celui-ci je me suis souvenu avoir entendu la voix d’Okamura quelque part, après avoir creusé quelques temps dans les tiroirs de ma mémoire musicale, je me suis souvenu qu’il s’agissait de la chanson ラブメッセージ, thème principal de l’incroyable navet qu’est le film みんな!エスパーだよ, The Virgin Psychics en anglais (2015), une adaptation du manga et du dorama du même nom.

Je trébuche ensuite sur la surprenante collaboration entre Okamura et l’un des Dj et producteur japonais les plus célèbres Takkyu Ishino 石野卓球, la moitié du groupe Denki Groove, sur l’album sobrement appelé ‘The Album‘ (2003), sur lequel Okamura pose sa voix sur des productions d’Ishino. Pour être franc l’album est moins pire que ce que à quoi je m’attendais, uniquement les titres ‘New Wave Boy‘, ‘Adventure (e-pop mix)‘ et à la limite ‘come baby (Yasuyuki Okamura remix)‘ ont retenu mon attention, la voix grave, les cris et autres vociférations d’Okamura parfois robotisées ou déformées collant assez bien à la musique. Le reste est trop farfelu et incohérent, il me semble d’ailleurs que sur l’ensemble de sa carrière Okamura est un personnage qui ne se prend pas au sérieux comme en témoignent les clips présentés ci-dessus.

Finalement, de fil en aiguille ce billet m’aura amené plus loin que je ne l’aurai pensé et aura même été l’occasion de faire quelques découvertes !

musiques/Nagoya

Art de rue – Osu-Sakae

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Osu danseurs
stickers
peinture murale
devanture de magasin
devanture de magasin

L’art de rue. Qu’il s’agisse de danseurs révisant en groupe leurs chorégraphies, de peintures murales ou de graffitis en guise de logo de magasin, dans les quartiers d’Osu et Sakae l’art est partout quelque soit l’heure ou le jour où l’on vienne. Il serait prétentieux de parler d’art mais je continue à prendre en photo les devantures de magasins et surtout les arrangements de pots de fleurs et autres plantes devant les maisons. Je ne peux m’empêcher de croire que leurs propriétaires les ont posé là en pensant au moindre détail, changeant leur ordre et leur disposition, reculant de quelques pas, contemplant leur ‘oeuvre’ et chuchotant ‘Oui, c’est bien mieux comme ça !‘ Je me demande s’ils se doutent un instant qu’un parfait inconnu va les prendre en photo, je suppose que non.

J’ai été très affairé le week-end passé et pour une fois j’étais presque content qu’il pleuve. Je zappe en effet entre la retransmission en direct de la course de trail Istria 100 qui se tient en Croatie (Kimino Miyazaki première femme sur la 168km!) et le festival de musique Coachella qui a lieu du 14 au 16 et du 21 au 23 avril en Californie. Parmi la multitude de noms d’artistes plus ou moins connus les noms de Björk, Marc Rebillet, Chemical Brothers, Gorillaz et Kaytranada ont retenu mon attention. Je suis plutôt déçu par le set de Kaytranada, le mix contenant de nombreux classiques est de très bonne qualité mais il ne se passe pratiquement rien sur scène, on a l’impression de juste écouter un cd. La mise en scène de Chemical Brothers est par contre comme toujours incroyable avec ces animations gigantesques, on en prend plein les yeux. Il est juste dommage que la qualité du son sur Youtube soit plutôt médiocre, sur la longue les aigus me vrillent le cerveau. Et puis il y a la fougue de Marc Rebillet, en peignoir de bain comme d’habitude, en transe, détruisant la moitié de son décor et courant en tout sens comme un gosse mal élevé. Sa capacité à faire un morceau de 5 minutes sur une boucle improvisée assez stupide pour qu’il en rigole lui-même, me fascine. Il faudra vraiment que j’aille voire ça si il passe au Japon.

Depuis les retransmission hebdomadaires des concerts de Sakanaction sur Youtube j’ai pris l’habitude de suivre distraitement le chat lors de ce genre d’événements car cela donne quelque part l’impression d’être dans la foule. Malheureusement celui-ci était perpétuellement envahi de messages de fans du groupe de k-pop Black Pink du genre ‘Black Pink meilleur groupe au monde!’ et autres lignes entières d’emoji de coeurs noirs et roses, le tout alors que le live n’avait lieu que le lendemain. J’ai plutôt été choqué par le niveau de médiocrité des fans et contraint de quitter le chat sous peine de devenir fou.

Le titre de ce blog me remémore l’album du même nom du groupe de rap marseillais Fonky Family sorti en 2001. Ou disons que son titre était inscrit quelque part dans mon subconscient et a soudainement surgi sans crier gare à l’évocation de l’assemblage des termes ‘art’ et ‘rue’. Pour la peine je me réécoute l’album vite-fait mais comme à l’époque je n’accroche pas du tout. Le flow est bon mais les textes contiennent trop d’ego-trip et je me lasse rapidement. De fil en aiguille les logarithmes de Youtube m’amènent à écouter l’émission spéciale dédiée à la Mafia K’1 Fry en direct des anciens locaux du Tati Barbès, à Paris. C’est très amusant parce que j’ai habité pendant deux ans à 50 mètres de là, de 2004 à 2006, juste avant de venir au Japon. Une fois encore l’écriture de ce blog me donne l’occasion de découvrir de nouvelles choses, mais aussi de plonger dans mes souvenirs …